Grève des contrôleurs aériens : vols annulés en série dans les aéroports français, la DGAC impose des réductions massives

Les 3 et 4 juillet 2025, en pleine période de grands départs en vacances, une grève des contrôleurs aériens a été déposée. La DGAC impose des réductions massives de vols dans plusieurs aéroports, invoquant un contexte de sous-effectif et de réforme contestée.

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Illustration. Avion de la compagnie "Air France" © Andrew Cutajar / LUPXL
Illustration. Avion de la compagnie "Air France" © Andrew Cutajar / LUPXL

La Direction générale de l’aviation civile (DGAC) a demandé mardi 1er juillet aux compagnies aériennes de revoir à la baisse leur programme de vols, en réponse à un préavis de grève déposé pour les 3 et 4 juillet par deux syndicats représentatifs mais non majoritaires des contrôleurs aériens, l’Unsa-ICNA et l’Usac-CGT. Les passagers sont appelés à reporter leurs déplacements si possible et à consulter leur compagnie pour vérifier l’état de leur vol.

Cette décision, annoncée à la veille des vacances scolaires d’été, vise à limiter les retards et les perturbations, même si la DGAC prévient qu’elles seront nombreuses et inévitables, malgré les ajustements demandés. Nice, le troisième aéroport du pays, est contraint de supprimer 50 % de ses vols, tout comme Bastia et Calvi ; Paris-Charles de Gaulle, Paris-Orly et Beauvais doivent réduire leur programme de 40 %, tandis que Lyon, Marseille, Montpellier, Ajaccio et Figari en annulent 30 %.

Des revendications syndicales portées par un contexte de réformes et un climat social dégradé

Derrière cette mobilisation, les griefs exprimés convergent autour de deux points centraux : une organisation du travail jugée défaillante et un projet de réforme structurelle de la navigation aérienne. Les syndicats dénoncent un sous-effectif chronique, un management qualifié de « vertical » et de « toxique », et la mise en place imminente d’un système de badgeage biométrique visant à contrôler la présence effective des contrôleurs sur leur poste, mesure vue comme une remise en cause de la confiance accordée aux équipes opérationnelles.

Cette badgeuse fait suite à un rapport du Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA) publié fin 2023, après un incident grave à l’aéroport de Bordeaux-Mérignac, au cours duquel deux avions ont failli entrer en collision, alors que trois contrôleurs seulement, au lieu de six, étaient présents dans la tour. Le rapport pointait un fonctionnement collectif où les effectifs réels restaient en deçà du niveau requis, hors de tout cadre légal, avec l’accord tacite de la hiérarchie.

Un plan de modernisation mal perçu par les personnels concernés

La DGAC justifie les mesures de contrôle et la réorganisation des services par la nécessité d’accompagner la hausse continue du trafic aérien tout en garantissant la sécurité et l’efficacité du réseau. Cette modernisation repose sur un programme pluriannuel de cinq ans, qui prévoit, entre autres, la fermeture d’un quart des tours de contrôle entre 2028 et 2035 et la réduction du nombre de centres d’approche de 30 à 16. Les plus petits aéroports, accueillant moins de 150 000 passagers par an, comme Deauville, Metz ou Dole-Jura, seraient directement concernés par ces fermetures.

La France, avec son maillage dense de tours de contrôle, se situe bien au-dessus des standards européens, ce que la DGAC entend rationaliser. Toutefois, pour les syndicats, cette restructuration risque de provoquer des suppressions de postes dans les territoires et de détériorer les conditions de travail sans garantir une véritable harmonisation à l’échelle européenne.

Le gouvernement réagit fermement face à un mouvement qu’il juge « malvenu »

Le ministre des Transports, Philippe Tabarot, a vivement critiqué le moment choisi pour ce mouvement social, rappelant qu’il intervient alors que des centaines de milliers de voyageurs s’apprêtent à prendre l’avion. Il déplore que ce soient des organisations minoritaires l’Unsa-ICNA ayant réuni 17 % des suffrages et l’Usac-CGT 16 % aux dernières électioni, qui « paralysent ainsi le trafic à l’échelle nationale ».

En marge du congrès de la Fédération nationale de l’aviation, le ministre a qualifié les revendications de ces syndicats « d’inacceptables », tout en rappelant que des efforts significatifs avaient été faits pour revaloriser les rémunérations, avec des hausses salariales comprises entre 500 et 1 500 euros selon les sites.

Air France et Transavia particulièrement exposées, des retombées concrètes sur le terrain

Avec près de 1 000 vols opérés chaque jour durant la haute saison, Air France et sa filiale à bas coûts Transavia sont fortement exposées aux réductions de trafic imposées à Orly et à Nice, deux de leurs plateformes principales. Les effets de la grève s’étendent sur tout le territoire et s’ajoutent à un contexte logistique déjà complexe. Le Syndicat national des contrôleurs du trafic aérien (SNCTA), majoritaire dans la profession, ne s’est pas joint à cette mobilisation.

La loi Diard, qui encadre strictement le droit de grève dans le secteur aérien, impose que les salariés se déclarent individuellement 48 heures avant leur retrait, ce qui permet à la DGAC d’anticiper et d’ajuster le dispositif, sans pour autant écarter la possibilité de désorganisation sur certaines tranches horaires ou sur certains aéroports plus sensibles.