Un maraîcher condamné à deux ans de prison pour travail dissimulé de sans-papiers dans la Sarthe

Un producteur de tomates de 64 ans, installé à Saint-Paterne-Le Chevain dans la Sarthe, a été condamné lundi 1er juillet à deux ans de prison ferme pour avoir employé illégalement des travailleurs sans-papiers dans des conditions dégradantes. Déjà multirécidiviste, il devra également verser près de 30 000 euros d’indemnisation à ses victimes et au syndicat CGT.

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© Lyn Ong / LUPXL

Le tribunal correctionnel du Mans a rendu son jugement ce lundi. Le maraîcher, âgé de 64 ans, avait déjà été condamné à 17 reprises dans le passé, dont cinq fois pour travail dissimulé. Cette fois, le producteur de tomates multirécidiviste comparaissait pour des faits survenus entre 2019 et 2024.

Le procureur Arnaud Marie avait souligné au cours de l’audience la motivation exclusivement financière de l’accusé. L’homme ne recrutait, selon le parquet, que des travailleurs sans titre de séjour. L’enquête et les témoignages recueillis ont mis en lumière des conditions de travail particulièrement difficiles sur l’exploitation agricole. Certains ouvriers, originaires du Sénégal, d’Algérie, d’Arménie ou de Mongolie, travaillaient jusqu’à 12 heures par jour, y compris les week-ends, pour des salaires parfois inférieurs à 3 euros de l’heure, comme le rapporte nos confrères de Ouest-France.

Des anciens salariés ont décrit une atmosphère de pression systémique, des cris répétés, des insultes, et des amendes infligées pour des pauses jugées trop longues. L’utilisation d’insecticides dans les serres, sans aucune protection, a également été évoquée, tout comme les températures étouffantes dans la serre. Un mineur avait témoigné avoir été employé dès l’âge de 15 ans pendant les vacances scolaires.

La ligne de défense du maraîcher rejetée par la justice

À la barre, l’agriculteur a tenté de se justifier en se présentant comme un homme charitable : « Les gens frappent à ma porte pour avoir du travail et je leur en donne. C’est un peu la maison du bon Dieu chez moi », avait-il déclaré lors de l’audience. Il s’est également présenté comme « victime de son bon cœur » et a dénoncé un système judiciaire trop rigide.

Le tribunal ne l’a toutefois pas suivi sur ce terrain. Bien qu’il ait été relaxé des chefs de traite d’êtres humains, de blanchiment et de soumission à des conditions de travail indignes, il a été reconnu coupable de nombreuses infractions. Le juge a estimé qu’il avait sciemment contourné la loi pour maximiser ses profits au détriment de personnes en situation de vulnérabilité.

Une interdiction définitive d’être à la tête d’une entreprise

En plus des deux ans de prison ferme, le tribunal a prononcé des mesures complémentaires à son encontre. Le maraîcher a été condamné à verser près de 30 000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral à douze anciens travailleurs et au syndicat CGT, partie civile dans ce dossier. Deux de ses parcelles agricoles ont été saisies par la justice. Il lui est par ailleurs désormais interdit de diriger une entreprise, de manière définitive. Pour Me Mouna Benyoucef, avocate de la CGT et de plusieurs plaignants, il s’agit ni plus ni moins « d’esclavagisme moderne ».