Dans l’émission À l’air libre de Mediapart, Hélène Perlant, fille du Premier ministre François Bayrou, a livré un témoignage troublant en compagnie d’Alain Esquerre, fondateur du collectif des victimes de l’établissement catholique de Bétharram et coauteur du livre Le Silence de Bétharram. Ancienne élève de l’établissement, Hélène Perlant a récemment révélé avoir elle-même été victime de violences physiques à l’âge de 14 ans.
Sur le plateau, elle affirme que François Bayrou, figure politique influente des Pyrénées-Atlantiques, aurait bien eu connaissance de l’enquête en cours contre le père Carricart, directeur de l’établissement mis en examen en 1998 pour viol et tentative de viol sur mineur. « Il ne s’en souvient pas, je pense, mais je suis là, le soir où il rentre de chez le juge Mirande. On est là, tous seuls, tous les deux », déclare-t-elle, évoquant un échange intime avec son père. Ce dernier lui aurait confié, sous le sceau du secret : « Ne le répète surtout pas, j’ai juré d’être dans le secret de l’instruction. Est-ce que tu crois possible ça ? »
Une affirmation qui va à l’encontre des affirmations passées de François Bayrou
Ce souvenir va à l’encontre des affirmations passées de François Bayrou, qui a toujours soutenu avoir été tenu à l’écart des détails de l’enquête. Hélène Perlant rapporte également que son père lui aurait annoncé le placement en détention du père Carricart : « Il est en prison, qu’il y reste. » Le prêtre se donnera la mort en 2000, deux ans après sa mise en examen, laissant une lettre proclamant son innocence. « Le suicide a été pour tout le monde une horreur », confie-t-elle.
Le juge d’instruction de l’époque, Christian Mirande, a lui aussi évoqué une rencontre avec François Bayrou dans le cadre de cette affaire. Auditionné par la commission d’enquête parlementaire sur la prévention des violences en milieu scolaire, il a confirmé avoir reçu le futur ministre à son domicile. « Lorsqu’il est venu me voir, il me semble qu’il cherchait à se renseigner sur les faits en cours », a déclaré le magistrat. Il précise cependant que la discussion, bien que longue, « n’a pas trahi le secret de l’instruction » et s’est limitée à des éléments déjà rendus publics.
Selon le juge, Bayrou exprimait une forte inquiétude, notamment concernant son fils, alors élève à Bétharram. « Ce qui m’a marqué, c’est qu’il n’arrivait pas à croire à la réalité des faits. Je me souviens très précisément qu’il répétait à plusieurs reprises : “C’est incroyable, c’est incroyable.” »