Deux ans après les révoltes urbaines déclenchées par la mort de Nahel Merzouk à Nanterre, tué par un tir policier, la place Beauvau a formalisé sa doctrine d’intervention face aux « violences urbaines » dans une instruction commune transmise à la police nationale et à la préfecture de police de Paris fin juillet. Ce document de 18 pages, accompagné de 34 annexes est destiné « à mettre à disposition des services territoriaux de la police nationale un guide pratique pour la gestion des violences urbaines. ». « Ce document a vocation à répondre à toutes les situations de violences urbaines, jusqu’aux émeutes insurrectionnelles, caractérisées par une très haute intensité », explique la place Beauvau, qui s'est bien gardée d'informer les organisations de journalistes. Présenté comme un « guide pratique », il vise à tirer les leçons des « violences urbaines inédites » de l’été 2023, qui avaient placé les forces de l’ordre sous forte tension. Aucune communication officielle n’a accompagné sa diffusion. Celui-ci n’est devenu public qu’à la suite de sa mise en ligne par le Syndicat National des Personnels de Police Scientifique, fin août. Au sein du texte, une phrase retient particulièrement l’attention : « La prise en compte du statut des journalistes telle que consacrée par le schéma national du maintien de l’ordre ne trouve pas à s’appliquer dans un contexte de violences urbaines. » Pour les syndicats, cette disposition équivaut à interdire aux reporters d’exercer leur mission dans des espaces publics au moment où l’information est la plus nécessaire. Le SNJ dénonce « une attaque en règle contre la liberté d’informer et d’être informé », ajoutant que cette incise constitue « une provocation envers toute la profession ». Pour Emmanuel Poupard, secrétaire général du syndicat, « le rôle du journaliste est de documenter les dérives qui peuvent se produire de part et d’autre ». Le syndicat des journalistes fait un recours devant le Conseil d’État En juin 2021, le Conseil d’État avait déjà été saisi par le Syndicat national des journalistes (SNJ), la CGT, Solidaires et la Ligue des droits de l’Homme contre le « Schéma national du maintien de l’ordre » (SNMO), jugé attentatoire à la liberté d’informer et d'être informé. La haute juridiction avait alors partiellement annulé le texte, rappelant que les journalistes doivent pouvoir couvrir les opérations de maintien de l’ordre, y compris lors de la dispersion d’un attroupement, tant qu’ils ne font pas obstacle à l’action des forces de sécurité. Dans sa décision du 10 juin 2021, elle avait précisé que les journalistes ne peuvent être contraints de quitter les lieux ni soumis à des obligations d’accréditation, confirmant ainsi leur droit de documenter les événements en temps réel. Cette jurisprudence renforce aujourd’hui les arguments des syndicats contre le nouveau « Schéma national des violences urbaines ». Le nouveau texte, selon le SNJ, réactive cette volonté « d’invisibiliser d’éventuelles dérives policières ». Le SNJ a mandaté le cabinet Spinosi pour déposer une requête en urgence devant le Conseil d’État et préparer un recours au fond d’ici fin septembre. Le syndicat appelle les organisations attachées aux libertés fondamentales à rejoindre cette procédure, alors que des mobilisations sociales sont prévues les 10 et 18 septembre. Soraya Morvan-Smith (SNJ-CGT) alerte dans les colonnes de l'Humanité sur un « régime dérogatoire » qui pourrait créer des angles morts dans la couverture médiatique, « Un journaliste est-il interdit d’avoir accès à certaines zones en France ? Certaines zones qui sont sur la voie publique, quand même. Pour nous c’est une grave attente à la liberté d’informer. » Rétropédalage du ministère après la réaction des journalistes Les critiques ne viennent pas uniquement des syndicats de journalistes. Reporters sans frontières (RSF) regrette « un choc sur la méthode et sur le fond » et plaide pour un dialogue centré sur la protection des reporters. Face à la polémique, la police nationale a assuré sur le réseau X que le SNVU « ne remet pas en cause la présence des journalistes lors de ces événements ni ne bride la liberté d’informer », promettant d’apporter des « précisions » pour lever toute ambiguïté. La direction générale de la police nationale confirme que « la tournure de la phrase sera reprise afin d’éviter toute mauvaise interprétation ». Dans la pratique, les reporters se heurtent déjà à des pressions depuis plusieurs années : sommés de quitter les lieux lors des dispersions, pris pour cibles par certains manifestants ou bousculés par les forces de l’ordre.
Deux ans après les révoltes urbaines déclenchées par la mort de Nahel Merzouk à Nanterre, tué par un tir policier, la place Beauvau a formalisé sa doctrine d’intervention face aux « violences urbaines » dans une instruction commune transmise à la police nationale et à la préfecture de police de Paris fin juillet. Ce document de 18 pages, accompagné de 34 annexes est destiné « à mettre à disposition des services territoriaux de la police nationale un guide pratique pour la gestion des violences urbaines. ». « Ce document a vocation à répondre à toutes les situations de violences urbaines, jusqu’aux émeutes insurrectionnelles, caractérisées par une très haute intensité », explique la place Beauvau, qui s'est bien gardée d'informer les organisations de journalistes. Présenté comme un « guide pratique », il vise à tirer les leçons des « violences urbaines inédites » de l’été 2023, qui avaient placé les forces de l’ordre sous forte tension. Aucune communication officielle n’a accompagné sa diffusion. Celui-ci n’est devenu public qu’à la suite de sa mise en ligne par le Syndicat National des Personnels de Police Scientifique, fin août. Au sein du texte, une phrase retient particulièrement l’attention : « La prise en compte du statut des journalistes telle que consacrée par le schéma national du maintien de l’ordre ne trouve pas à s’appliquer dans un contexte de violences urbaines. » Pour les syndicats, cette disposition équivaut à interdire aux reporters d’exercer leur mission dans des espaces publics au moment où l’information est la plus nécessaire. Le SNJ dénonce « une attaque en règle contre la liberté d’informer et d’être informé », ajoutant que cette incise constitue « une provocation envers toute la profession ». Pour Emmanuel Poupard, secrétaire général du syndicat, « le rôle du journaliste est de documenter les dérives qui peuvent se produire de part et d’autre ». Le syndicat des journalistes fait un recours devant le Conseil d’État En juin 2021, le Conseil d’État avait déjà été saisi par le Syndicat national des journalistes (SNJ), la CGT, Solidaires et la Ligue des droits de l’Homme contre le « Schéma national du maintien de l’ordre » (SNMO), jugé attentatoire à la liberté d’informer et d'être informé. La haute juridiction avait alors partiellement annulé le texte, rappelant que les journalistes doivent pouvoir couvrir les opérations de maintien de l’ordre, y compris lors de la dispersion d’un attroupement, tant qu’ils ne font pas obstacle à l’action des forces de sécurité. Dans sa décision du 10 juin 2021, elle avait précisé que les journalistes ne peuvent être contraints de quitter les lieux ni soumis à des obligations d’accréditation, confirmant ainsi leur droit de documenter les événements en temps réel. Cette jurisprudence renforce aujourd’hui les arguments des syndicats contre le nouveau « Schéma national des violences urbaines ». Le nouveau texte, selon le SNJ, réactive cette volonté « d’invisibiliser d’éventuelles dérives policières ». Le SNJ a mandaté le cabinet Spinosi pour déposer une requête en urgence devant le Conseil d’État et préparer un recours au fond d’ici fin septembre. Le syndicat appelle les organisations attachées aux libertés fondamentales à rejoindre cette procédure, alors que des mobilisations sociales sont prévues les 10 et 18 septembre. Soraya Morvan-Smith (SNJ-CGT) alerte dans les colonnes de l'Humanité sur un « régime dérogatoire » qui pourrait créer des angles morts dans la couverture médiatique, « Un journaliste est-il interdit d’avoir accès à certaines zones en France ? Certaines zones qui sont sur la voie publique, quand même. Pour nous c’est une grave attente à la liberté d’informer. » Rétropédalage du ministère après la réaction des journalistes Les critiques ne viennent pas uniquement des syndicats de journalistes. Reporters sans frontières (RSF) regrette « un choc sur la méthode et sur le fond » et plaide pour un dialogue centré sur la protection des reporters. Face à la polémique, la police nationale a assuré sur le réseau X que le SNVU « ne remet pas en cause la présence des journalistes lors de ces événements ni ne bride la liberté d’informer », promettant d’apporter des « précisions » pour lever toute ambiguïté. La direction générale de la police nationale confirme que « la tournure de la phrase sera reprise afin d’éviter toute mauvaise interprétation ». Dans la pratique, les reporters se heurtent déjà à des pressions depuis plusieurs années : sommés de quitter les lieux lors des dispersions, pris pour cibles par certains manifestants ou bousculés par les forces de l’ordre.
Deux ans après les révoltes urbaines déclenchées par la mort de Nahel Merzouk à Nanterre, tué par un tir policier, la place Beauvau a formalisé sa doctrine d’intervention face aux « violences urbaines » dans une instruction commune transmise à la police nationale et à la préfecture de police de Paris fin juillet. Ce document de 18 pages, accompagné de 34 annexes est destiné « à mettre à disposition des services territoriaux de la police nationale un guide pratique pour la gestion des violences urbaines. ». « Ce document a vocation à répondre à toutes les situations de violences urbaines, jusqu’aux émeutes insurrectionnelles, caractérisées par une très haute intensité », explique la place Beauvau, qui s'est bien gardée d'informer les organisations de journalistes. Présenté comme un « guide pratique », il vise à tirer les leçons des « violences urbaines inédites » de l’été 2023, qui avaient placé les forces de l’ordre sous forte tension. Aucune communication officielle n’a accompagné sa diffusion. Celui-ci n’est devenu public qu’à la suite de sa mise en ligne par le Syndicat National des Personnels de Police Scientifique, fin août. Au sein du texte, une phrase retient particulièrement l’attention : « La prise en compte du statut des journalistes telle que consacrée par le schéma national du maintien de l’ordre ne trouve pas à s’appliquer dans un contexte de violences urbaines. » Pour les syndicats, cette disposition équivaut à interdire aux reporters d’exercer leur mission dans des espaces publics au moment où l’information est la plus nécessaire. Le SNJ dénonce « une attaque en règle contre la liberté d’informer et d’être informé », ajoutant que cette incise constitue « une provocation envers toute la profession ». Pour Emmanuel Poupard, secrétaire général du syndicat, « le rôle du journaliste est de documenter les dérives qui peuvent se produire de part et d’autre ». Le syndicat des journalistes fait un recours devant le Conseil d’État En juin 2021, le Conseil d’État avait déjà été saisi par le Syndicat national des journalistes (SNJ), la CGT, Solidaires et la Ligue des droits de l’Homme contre le « Schéma national du maintien de l’ordre » (SNMO), jugé attentatoire à la liberté d’informer et d'être informé. La haute juridiction avait alors partiellement annulé le texte, rappelant que les journalistes doivent pouvoir couvrir les opérations de maintien de l’ordre, y compris lors de la dispersion d’un attroupement, tant qu’ils ne font pas obstacle à l’action des forces de sécurité. Dans sa décision du 10 juin 2021, elle avait précisé que les journalistes ne peuvent être contraints de quitter les lieux ni soumis à des obligations d’accréditation, confirmant ainsi leur droit de documenter les événements en temps réel. Cette jurisprudence renforce aujourd’hui les arguments des syndicats contre le nouveau « Schéma national des violences urbaines ». Le nouveau texte, selon le SNJ, réactive cette volonté « d’invisibiliser d’éventuelles dérives policières ». Le SNJ a mandaté le cabinet Spinosi pour déposer une requête en urgence devant le Conseil d’État et préparer un recours au fond d’ici fin septembre. Le syndicat appelle les organisations attachées aux libertés fondamentales à rejoindre cette procédure, alors que des mobilisations sociales sont prévues les 10 et 18 septembre. Soraya Morvan-Smith (SNJ-CGT) alerte dans les colonnes de l'Humanité sur un « régime dérogatoire » qui pourrait créer des angles morts dans la couverture médiatique, « Un journaliste est-il interdit d’avoir accès à certaines zones en France ? Certaines zones qui sont sur la voie publique, quand même. Pour nous c’est une grave attente à la liberté d’informer. » Rétropédalage du ministère après la réaction des journalistes Les critiques ne viennent pas uniquement des syndicats de journalistes. Reporters sans frontières (RSF) regrette « un choc sur la méthode et sur le fond » et plaide pour un dialogue centré sur la protection des reporters. Face à la polémique, la police nationale a assuré sur le réseau X que le SNVU « ne remet pas en cause la présence des journalistes lors de ces événements ni ne bride la liberté d’informer », promettant d’apporter des « précisions » pour lever toute ambiguïté. La direction générale de la police nationale confirme que « la tournure de la phrase sera reprise afin d’éviter toute mauvaise interprétation ». Dans la pratique, les reporters se heurtent déjà à des pressions depuis plusieurs années : sommés de quitter les lieux lors des dispersions, pris pour cibles par certains manifestants ou bousculés par les forces de l’ordre.