Le tribunal administratif annule le plan social d’Auchan prévoyant la suppression de plus de 2400 postes

Le tribunal administratif de Lille a annulé le PSE d’Auchan, qui visait près de 2 400 suppressions de postes. L’enseigne, détenue par la famille Mulliez, a indiqué faire appel de cette décision.

© Jean-Louis Zimmermann/WIKIMEDIA
Façade d'une enseigne Auchan appartenant à la famille Mulliez © Jean-Louis Zimmermann/WIKIMEDIA

La juridiction administrative a jugé mardi que le plan social d’Auchan Retail France ne respectait pas certaines obligations légales. Le PSE, conclu au niveau du groupe et non au sein de chaque entité, devait selon le tribunal être validé par les syndicats de chacune des cinq composantes. De plus, les comités sociaux et économiques n’auraient pas reçu toutes les informations financières nécessaires pour rendre un avis éclairé sur la situation économique de l’entreprise.

Auchan Retail a aussitôt indiqué qu’il interjetait appel, affirmant que la décision ne remettait pas en cause la qualité du plan ni les efforts mis en œuvre pour limiter les licenciements. La cour administrative d’appel, saisie, dispose désormais de trois mois pour rendre sa décision.

Les deux points clés de l’annulation

D’une part, le tribunal a estimé que les signatures syndicales recueillies au seul niveau du groupe ne pouvaient suffire. Un accord-cadre peut exister, mais il doit être adapté à chaque entité, a rappelé l’avocate Judith Krivine, qui représentait le CSE d’Auchan E-commerce France et des salariés.

D’autre part, l’information fournie aux CSE s’est limitée aux données de Suraumarché, société qui contrôle les structures concernées. Or, celle-ci est elle-même détenue par trois sociétés principales de la galaxie Mulliez, ce qui aurait dû élargir le périmètre d’information. Cette lacune a été jugée comme un vice de procédure.

Auchan Retail soutient que son plan social a été construit avec sérieux et qu’il a déjà permis à une partie des salariés de trouver une solution. Sur environ 2 400 postes concernés, près d’un millier de personnes auraient déjà été reclassées ou reprises, dont 320 par des mobilités internes.

Les critiques syndicales autour de la galaxie Mulliez

La CGT Commerces et services estime pour sa part que cette décision constitue un tournant. Le syndicat reproche au groupe familial d’avoir cloisonné ses activités à travers des structures juridiques distinctes, ce qui aurait permis d’écarter la bonne santé financière de certaines enseignes comme Decathlon ou Kiabi dans l’évaluation du PSE.

Pour la CGT, l’empire Mulliez ne peut se présenter uniquement comme une constellation d’entreprises isolées alors que ses filiales représentent un poids considérable dans l’économie française. Le jugement, selon le syndicat, pourrait ouvrir la voie à une meilleure protection des salariés dans d’autres entreprises confrontées à des restructurations similaires.

Si l’appel ne change pas l’issue, ce dossier pourrait servir de référence pour d’autres procédures. Les magistrats de la cour administrative d’appel, puis éventuellement du Conseil d’État, devront préciser dans quelle mesure un groupe d’entreprises peut négocier un plan social unique. Pour les salariés, une confirmation de l’annulation offrirait la possibilité de saisir les prud’hommes pour obtenir des indemnisations supplémentaires.