La France se prépare à une journée de grève le 18 septembre

Plus de 250 manifestations sont prévues jeudi dans toute la France, à l’appel d’une intersyndicale interprofessionnelle. La journée vise à protester contre les mesures budgétaires jugées « brutales », qui touchent travailleurs, retraités, précaires et malades. Écoles, transports, hôpitaux, pharmacies et industries seront concernés.

© ALOIS MOUBRAX/ALOTROBO/PXL

La journée du 18 septembre 2025 est organisée par huit syndicats représentatifs, réunis pour contester les mesures budgétaires présentées cet été par François Bayrou, Premier ministre démissionnaire, et maintenues par son successeur Sébastien Lecornu. Les syndicats dénoncent une politique qu’ils estiment injuste : « Faire payer, encore une fois, les travailleuses et travailleurs, les précaires, les retraités, les malades ».

Selon le ministère de l’Intérieur, la mobilisation pourrait rassembler entre 600 000 et 900 000 personnes sur l’ensemble du territoire. Environ 250 cortèges sont prévus, ce qui représente une amplitude et un maillage national inédit. À Paris, le rassemblement est estimé entre 30 000 et 60 000 manifestants, avec un cortège partant de la place de la Bastille à 14 h, passant par la place de la République, puis la place de la Nation. Dans le Grand Ouest, environ 100 000 personnes sont attendues à Rennes, Nantes, Bordeaux, Toulouse, Montpellier, Lyon et Dijon.

Les autorités anticipent que cette journée pourrait dépasser en ampleur le mouvement « Bloquons tout » qui avait eu lieu le mercredi 10 septembre 2025, né sur les réseaux sociaux. Ce nouvel appel, lancé par l’intersyndicale, vise à transformer la contestation sociale en un mouvement structuré et coordonné sur tout le territoire.

Une mobilisation forte dans les écoles et la fonction publique

Dans les écoles primaires publiques, le SNUipp-FSU, principal syndicat du primaire, prévoit qu’un tiers des enseignants seront en grève jeudi. À Paris, ce taux pourrait atteindre 45 %, avec au moins 90 écoles fermées. Les syndicats dénoncent un manque de moyens et un budget insuffisant pour l’éducation publique : « L’école publique a urgemment besoin de moyens à la hauteur et d’un véritable budget », souligne la FSU-Snuipp dans un communiqué. Selon leur enquête de rentrée, près de 3 000 classes sur 6 063 ne disposeraient pas d’un enseignant affecté pour l’année scolaire.

Dans le secondaire, six syndicats sur sept appellent également à la grève, représentant plus de 90 % des personnels de l’éducation nationale publique. La plupart des syndicats du privé sous contrat se joignent au mouvement, ce qui constitue un phénomène rare et témoigne de l’ampleur de la mobilisation.

Au-delà de l’éducation, l’ensemble des agents de la fonction publique est concerné, ce qui élargit la portée nationale de la journée. La grève dépasse ainsi le cadre strict des écoles pour toucher tous les secteurs publics et parapublics.

Des perturbations importantes prévues dans les transports

Dans le ferroviaire, 90 % des TGV circuleront, 50 % des Intercités et trois TER sur cinq, avec des variations selon les régions. En Île-de-France, le trafic sera fortement perturbé sur les RER D et E, ainsi que sur les lignes H, N, R et U du Transilien. Les RER A, B et C, ainsi que les lignes K, L et V connaîtront également des perturbations, avec seulement deux tiers des trains assurés.

Le métro parisien sera partiellement fonctionnel : seules les lignes automatiques 1, 4 et 14 fonctionneront normalement hors heures de pointe, tandis que certaines stations stratégiques resteront fermées toute la journée. Les lignes de bus franciliennes devraient fonctionner à 70 % environ.

Dans le secteur routier, les fédérations de routiers annoncent plusieurs actions dès jeudi matin dans les zones industrielles et sur les péages. Patrick Blaise, secrétaire général de l’Union fédérale route de la CFDT, indique que ces actions toucheront un grand nombre de personnes : « Le gouvernement est allé trop loin, en voulant opposer les jeunes et les vieux, en attaquant ceux qui travaillent… » Les taxis ne se mobiliseront pas, mais les chauffeurs VTC pourraient se joindre aux manifestations.

Dans l’aérien, Air France est concernée par un appel à la grève émis par la CGT, l’UNSA, la CFE-CGC, FO et la CFDT, mais les organisations sont parties « en ordre dispersé ». Les contrôleurs aériens ont repoussé leur préavis en l’absence de gouvernement, et l’ensemble des vols devrait être maintenu, avec seulement quelques retards ponctuels.

Le secteur de la santé en alerte.

Les professionnels de santé, hôpitaux et médecins, sont largement appelés à débrayer. La coalition Action praticiens hôpital (APH) invite les médecins à soutenir le mouvement. Dans les établissements hospitaliers, l’administration peut réquisitionner certains personnels afin d’assurer la continuité des soins.

Les pharmacies seront également touchées. Les deux principaux syndicats du secteur, l’USPO et la FSPF, ont appelé à une fermeture massive des officines pour protester contre la baisse du plafond des remises commerciales sur les médicaments génériques. Selon l’USPO, plus de 90 % des pharmacies devraient rester fermées jeudi. Les kinésithérapeutes participent aussi à la grève, fermant leurs cabinets pour la journée.

Les secteurs de énergie, la chimie et l’agriculture également mobilisés

Dans l’énergie, la CFE-Energie, principal syndicat d’EDF, appelle à débrayer pendant une heure ou à rejoindre les cortèges syndicaux. La CGT et la CFDT rejoignent ce mouvement dans les industries électriques et gazières.

Dans la chimie, plus de 150 appels à la grève ont été recensés dans des entreprises telles que TotalEnergies, Sanofi, Arkema, Air Liquide et Kem One. Dans certains sites, des rassemblements sont organisés en matinée, notamment devant le site Sanofi de Maisons-Alfort (Val-de-Marne).

En agriculture, la Confédération paysanne appelle les agriculteurs à se mobiliser sur tout le territoire pour réclamer plus de justice sociale, fiscale et environnementale. Elle alerte également sur le respect du droit de manifester face au déploiement policier annoncé.

Un dispositif d’État important

Les autorités redoutent la présence de plusieurs centaines de manifestants radicaux dans les grandes villes. À Paris, 1 000 black blocks sont attendus, et 8 000 sur l’ensemble du territoire, selon le ministère de l’Intérieur. Ces manifestants pourraient envisager des actions « coups de poing ».

Le dispositif de sécurité déployé sera massif, similaire à celui du 10 septembre : 80 000 policiers et gendarmes, 72 unités d’intervention spéciale (CRS et UFM), vingt-quatre engins blindés Centaure et dix canons à eau. Le préfet de police a exprimé ses inquiétudes sur la présence de casseurs à Paris, tandis que les autorités locales appellent à la vigilance et à la coordination avec les forces de l’ordre.