Fitch rétrograde la note de la France à A+ sur fond d’instabilité politique et budgétaire

Vendredi soir, l’agence américaine de notation Fitch a abaissé la note souveraine de la France, désormais évaluée à A+. Elle invoque une instabilité politique persistante et des incertitudes budgétaires qui compromettent la consolidation des finances publiques.

Assemblée Nationale , Paris, France (illustration)
Assemblée Nationale , Paris, France (illustration) © LUPEXL / Abhishek Navlakha

La France, deuxième économie de la zone euro, voit ainsi sa note reculer d’un cran, de AA− à A+, avec une perspective désormais stable. Cette révision est révélée seulement quelques jours après la chute du gouvernement de François Bayrou et la nomination de Sébastien Lecornu comme Premier ministre, troisième chef de gouvernement en douze mois. L’agence de notation américaine Fitch évoque la « fragmentation » et la « polarisation croissante » de la vie politique, jugées de nature à réduire la capacité du pays à engager une consolidation budgétaire de grande ampleur.

Alors que le gouvernement sortant ambitionnait de ramener le déficit public sous 3 % du PIB en 2029 avec des mesures antisociales, Fitch estime qu’un tel objectif n’est pas réaliste. Selon l’agence, le déficit restera au-dessus de 5 % en 2026 et 2027, bien au-delà de la cible de 4,6 % fixée par l’exécutif. La dette publique, qui représentait 113,9 % du PIB fin mars, pourrait grimper jusqu’à 121 % en 2027, sans horizon clair de stabilisation.

Éric Lombard, ministre sortant de l’Économie, a déclaré « prendre acte » de la décision de l’agence. François Bayrou, qui a alerté sur le poids de la dette et s’est refait son bureau à la mairie de Pau pour 40 000 euros, considère que le pays paie aujourd’hui son incapacité à affronter la réalité de ses finances. À gauche, Éric Coquerel (LFI), président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, attribue cette dégradation au discours alarmiste tenu ces derniers mois sur la situation budgétaire.

Un budget 2026 sous haute tension

Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu doit présenter rapidement un projet de loi de finances 2026 susceptible d’éviter une censure parlementaire. Le Parti socialiste réclame déjà l’abandon de la réforme des retraites et l’instauration d’une taxe ciblant les plus hauts patrimoines. Parallèlement, les syndicats appellent à une journée nationale de mobilisation le 18 septembre, dans un climat social tendu. Fitch anticipe que ces débats limiteront l’ampleur de l’ajustement budgétaire, initialement évalué à 44 milliards d’euros.

En perdant un cran, la France rejoint la catégorie dite « moyenne supérieure » de la notation internationale. Cette position reste honorable mais peut inciter certains investisseurs à privilégier des dettes perçues comme plus sûres. Les taux d’intérêt exigés pour financer la dette française risquent donc d’augmenter, alors que le service de cette dette est déjà évalué à 55 milliards d’euros en 2025. Pour l’économiste Lucile Bembaron (Asterès), « les marchés ont déjà intégré l’essentiel de cette réalité », soulignant que les agences suivent souvent avec un temps de retard.

Il s’agit du deuxième abaissement de la note française par Fitch depuis avril 2023. Moody’s et S&P Global doivent livrer leur propre analyse dans les prochaines semaines, respectivement le 24 octobre et le 28 novembre. Dans le même temps, Fitch a relevé la note du Portugal et S&P a salué le dynamisme de l’Espagne.